jeudi 18 septembre 2008

La Génèse: L'Aquarelliste et Tantine





La fenêtre aux volets clos au-dessus de la porte d'entrée de l'immeuble fut la chambre que je partageais avec Maman du temps des 'Glamorous Fifyties'.




44, Rue Jean de Bernady.












Louis Fouque mon Grand Père Maternel dénommé 'L'aquarelliste',naquit le 24 Avril 1877 à Marseille. Il était le second d'une fratrie de quatre enfants. Sa soeur Amélie née en 1868, était son ainée de neuf ans. Maman me parla d'elle dans une de ses rares lettres: 'Celle qui n'avait pas peur d'aller voir le Grand Turc!!!'. Il était suivi par son jeune frère 'Paul' qui eu un fils :'Jean Fouque' dont je fis connaissance le 15 Février 1955 lors de l'enterrement de mon grand père au cimetière de Saint Pierre .Enfin la fratrie s'achevait par sa jeune soeur Marie Louise née le 30 Octobre 1881 qui épousa plus tard un certain Etienne Casseli. Aujourd'hui par l'entremise de son petit fils Jean Pierre animateur à FR3 je suis en possession d'un DVD sur lequel j'ai pu reconnaître ma Grande Tante Marie Louise à laquelle je ressemble tellement.
En activité, Grand-papa fut entrepreneur en bâtiments dont le siège social se trouvait rue Chevillon non loin de son domicile du 44 Rue Jean de Bernady. C'est là que je venais passer un mois de vacances lorsque Maman revenait de Londres pour passer ses congés d'été dans la cité Phocéenne durant la période allant de 1950 à 1955 .Ma chambre se trouvait au premier étage de l'immeuble , juste au dessus de la porte d'entrée. Cette période que j'appelle 'The Glamorous Fifties' fut gravée dans ma mémoire d'enfant, reste encore aujourd'hui un souvenir inoubliable.Je reviendrai ultérieurement sur cette époque qui me fit tant rêver. Mais revenons à l'oeuvre artistique de Grand Papa pour lequel je portais une profonde affection. J'étais en admiration devant ses aquarelles , c'était bien plus beau que des photos en noir et blanc de l'époque . Pourtant ce n'était que de la peinture à l'eau comme le chanta Julien clerc. J'ai encore ce souvenir de l'homme élégant : avec son costume rayé trois pièces, son chapeau et sa canne. Ce qui m'intriguait le plus c'était son noeud de cravate toujours impeccable. Comment pouvait il faire cela ? C'était une énigme. L'année de mes sept ans en 1951, Maman décida de m'acheter une cravate 'Aux Deux Pierrots '. C'était une boutique pour enfants située en haut de la rue de Rome. C'est ainsi que ' L'aquarelliste' m'apprit à faire mon premier noeud de cravate!
Grand Papa fumait des gauloises vertes, souvent il me chargeait d'aller les lui acheter au bar-tabac situé à l'angle de la rue Jean de Bernady et du boulevard National. J'étais fier d'accomplir la mission confiée. Je me sentais investi d'une grande responsabilité . Le bar-tabac de Grand Papa existe toujours. La devanture est devenue sale, les platanes en cet endroit du boulevard ont été coupés pour laisser place à des arbres chétifs laissant passer les rayons du soleil. La fraîcheur d'antan a disparue, les voitures sont venues envahir les trottoirs, et la saleté se faufile de partout. Plusieurs magasins ont fermés leurs portes depuis longtemps. Ainsi la boucherie Chevaline du Boulevard Longchamp n'existe plus. Il en est de même de l'épicerie à l'angle de la rue d'Isoard, où Maman allait acheter le pâté pour nos piques niques aux Catalans. La pâtisserie à l'angle du Cours Joseph Thierry et du Boulevard Longchamp a cédé sa place à La Caisse D'épargne . Seul Plauchud résiste encore! Le quartier subit une lente agonie, il faut désormais se rendre Rue Consolat pour faire ses courses et encore rien n'est moins certain. Ce quartier qui fut si huppé jusqu'à la fin des années sixties est aujourd'hui laissé à l'abandon. Pourtant la remise en service du tram pourra peut être redonner vie à ce quartier . Déjà le flot bruyant des voitures a disparu. Le gazouillement des oiseaux se fait à nouveau entendre sur la plate forme du tramway certains soirs d'été. Cela n'est pas sans me rappeler le sifflement des hirondelles dans le ciel d'automne du jardin de la Rue Thiers. Mais plus de cinquante ans se sont écoulés dans la spirale du temps.
Lors de mes rares séjours à la rue Jean de Bernady, je ne voyais que rarement 'L'Aquarelliste'. Dès le matin il se rendait aux Beaux Arts où il enseignait l'art de L'aquarelle. L'école se situait à l'époque dans les locaux actuels du Palais Carli. Parfois en début d'après midi , nous le rejoignions au 'Sans Pareil' ce bar qui se situait à l'angle de La Canebière et de la rue Vincent Scotto. Il a été remplacé par la banque de la SMC à la façade austère. Fini le ballet incessant des garçons de café avec leurs noeuds papillons passant de table en table pour prendre les commandes. Fini les jeux de lumière du soir sur le macadam donnant de la vie à cette grande artère qu'était La Canebière. Oh désastre la vie disparaît , elle se cache aujourd'hui derrière les écrans plasma.
Il me reste à évoquer cette dernière image, où je lui demandais de fumer sa cigarette. Pour me donner l'illusion, mon Grand Père me la posait sur le bout de mon nez .'Tu triches Grand Papa! Je ne fume pas. Si...Si....regarde la fumée!'. La scène se déroulait dans la cuisine il y a plus de 55 ans! Ainsi de ces souvenirs lointains, que me reste t il de ce Grand Père que je connu si peu. Je répondrai un goût indiscutable pour l'élégance, et le sens de l'esthétique et de la décoration qu'il m'a légué au travers de son talent d'Aquarelliste.

Tantine

C'est la dénomination que lui avait attribué Maman, pour désigner sa tante maternelle. 'Tantine' fut donc pour moi ma grande tante. Elle est le personnage le plus attachant et le plus sensible qui marqua ma tendre enfance. Au travers des dynasties de L'éphémère et de L'obscur, je reviendrai plus longuement sur ses visites qu'elle me rendait rue Adolphe Thiers, en compagnie de Mademoiselle Cécile. J'évoquerai également nos expéditions en tramway pour nous rendre à la Capelette où elle résidait au couvent du sacré Coeur. C'est 'Tantine' qui en relation avec Tante Amélie, sa belle soeur, prirent en charge l'éducation de Maman qui se retrouve orpheline en 1930 au décès de Marie, Alexandrine ma grand mère maternelle. Durant près de douze ans Maman reçu la tendre affection de ses tantes. Pourtant en 1942, le destin frappe à nouveau à sa porte. En effet Tante Amélie décèda le 10 Novembre à l'âge de 74 ans. Seuls Tantine et L'Aquarelliste restèrent à ses côtés alors qu'elle n'a que dix sept ans.
Tantine fut pour moi ce personnage merveilleux de mon enfance, et dont je conserve ce souvenir douloureux car la providence n'a pas voulu que je puisse l'accompagner tout le long de la vie. Le destin nous a malheureusement séparés dès février 1955.
La dernière fois que je revis Tantine, fut en Juillet 1965 à la rue Jean de Bernady. Plus de neuf années s'étaient écoulées depuis nos expéditions à la Capelette du temps des 'Glamorous fifties'. Cette rencontre était inattendue, car j'étais venu à Marseille pour tenter de renouer une relation familiale normale avec Maman que je n'avais plus revue depuis Juin 1956 à Notre Dame du Laus. Descendu de Tallard en auto stop, j'avais compris en interrogeant les locataires de l'immeuble que Maman se trouvait là. Bien que je sonnais à plusieurs reprises , on ne m'ouvrait pas, pourtant la fenêtre de mon ancienne chambre était entre ouverte. C'était là le signe d'une présence dans l'appartement à cette heure de la journée. Que fallait t il faire pour me faire ouvrir la porte d'entrée sans alerter tout l'immeuble? L'idée me vint d'exercer une pression psychologique en bloquant la sonnette jusqu'à ce que la porte s'ouvre. Le résultat fut inespéré. Ainsi à ma grande surprise : Maman, Nasim, ma demi soeur Billy étaient là. Tantine s'y trouvait également mais elle était devenue totalement aveugle et sourde. Ainsi elle ne su jamais que son 'Petit Biquet' était venu. Maman s'était bien gardée de lui expliquer que j'étais là. 'Tantine' qui m'adorait aurait été 'aux anges', mais de cela Maman n'en voulait pas car elle aurait dû donner des explications à ma soeur Billy qui ignorait mon existence. Elle aurait ainsi découvert qu'elle avait un frère aîné de douze à treize ans, c'était impensable. Mais de quel crime étais-je coupable? Cela reste encore aujourd'hui une énigme qui a gâché une grande partie de ma vie.

1 commentaire:

Copernic a dit…

La malédiction s'abat sur la lignée Maternelle des Fouques:
Ainsi Le 18 Septembre 1929, sa soeur cadette,Marie Louise épouse Cassely décède subitement emportée par la maladie de malte;
Sa mère décède quelques mois plus tard le 26 Janvier 1930 à l'âge de 81 ans;
Quatre jours après, le 30 Janvier 1930 c'est le tour de son épouse qui décède à l'âge de 35 ans .
La Famille est décimée laissant L'Aquarelliste veuf dès 53 ans avec une fille orpheline à l'âge de 4 ans et demi.
Ce drame me fut toujours caché. J'en ignore toujours aujourd'hui les véritables raisons