mardi 12 mai 2009

L'Epopée Poitevine: Madame de Lizant






' La vieille Eglise de Lizant là où Marie Michelle fut baptisée en 1937'







Marie Michèle est née à Lizant aux confins de la Vienne en bordure du département de La Charente. En 1937, son père Amédée Souchaud y exerçait le noble métier d’instituteur. C’était encore une époque où les choses simples de la vie avaient encore du sens. Souvent nous traversions le département pour nous rendre dans l’arrondissement de Montmorillon où Lizant petite commune endormie du canton de Civray s’y trouve. Grâce à Google, j’ai pu retrouver cette vieille carte postale de son église où elle due être baptisée. On se rendit plusieurs fois à l’école primaire où son père y enseigna et où elle y fit ses premiers pas . C’était pour Marie Mich l’occasion de remémorer des temps anciens qu’elle évoquait avec beaucoup de charme et de conviction. Je l’écoutais, cela me sortait un peu de la torpeur dans laquelle j’étais plongé depuis le cataclysme que j’avais traversé à Ville Evrard qui venait souvent me hanter. Alors ses explications me faisaient un peu oublier cet enfer. J’aimais nos escapades à travers tout le département de la Vienne, c’était notre façon de nous évader à travers l’histoire de l’art Roman. Lizant c’était donc ce petit village endormi qui atteignait à peine 459 habitants en 2006 selon les données du dernier recensement. Nous venions là comme dans une sorte de recueillement, un retour aux sources, à ses origines : Madame De Lizant.
Escapades au Pays de Rabelais :

Des dizaines de villages furent ainsi visités. L’un des plus illustres est le Village d’Angles sur Anglin situé aux confins du Berry et du Poitou. C’est en ces lieux, en bordure de L’Anglin qu’en 1950 fut découvert le ‘Roc aux Sorciers’ le Lascaux de la sculpture où se développa voilà plus de 15 000 ans l’art Magdalénien. Je me souviens également de sa forteresse en ruine dominant le village sur les bords de la falaise qui se dresse à plus de cinquante mètres au dessus de la rivière au cours paisible et endormi.
La cité de Melle dans les deux sèvres au sud est de Niort placée sur l’une des routes menant à Saint Jacques de Compostelle dominant la vallée de la Beronne, conserve encore aujourd’hui trois belles églises romanes. Melle fut aussi renommée dès l’époque Gallo-Romaine par ses mines d’argent qui restèrent encore florissantes sous la royauté.
Nouaillé Maupertuis, dans un cadre évocateur, se distingue par son abbaye fortifiée de tours et donjons. Mais ce fut également le siège de la célèbre bataille que le Connétable Gauthier VI de Brienne livra le 19 Septembre 1356 contre le Comte de Salisbury et dont l’armée fut défaite par les redoutables archers de la perfide Albion.
L’Eglise romane de Saint Savin au bord de la Gartempe, dont ses fresques célèbres du XIème siècle furent classées patrimoine de l’humanité par L’UNESCO.
Ligugé au sud de Poitiers en bordure du Clain avec son abbaye, fondée en 361 par Martin, constitua le premier monastère de l’Occident chrétien.
Ainsi ce Poitou haut lieu du patrimoine de notre pays me laisse un souvenir chargé de nostalgie qui fut partagée avec Marie Mich. Elle qui avait aussi terriblement souffert, su en ces temps difficiles me faire oublier ces années douloureuses passées dans le macrocosme.
Vie Quotidienne à Saint Benoît :

Saint Benoît est une commune de la vienne de quelques 6000 habitants constituant une des banlieues pavillonnaires de la ville. Sous la révolution la commune s’appelait Saint Benoît de Quincay et ses habitants furent dénommés ‘Les Sancto-Bénédictins’. Marie Michelle y avait acquis un de ces petits pavillons au : ‘5 Rue des Fougères’. C’est dans cette petite maison que je séjournais avec elle de Février 1982 à Septembre 1984. Je faisais ainsi la connaissance de ses quatre enfants : Anne son ainée qui à l’époque poursuivait des études d’éducateur, François qui venait juste de réussir son baccalauréat et s’inscrire en AES à la Faculté de Poitiers. Isabelle était un peu l’artiste de la famille et poursuivait des études en communication. Enfin la petite dernière Véronique, qui a l’âge de mon fils Olivier : ‘Le Centurion Del Djem’, était encore une jeune lycéenne. C’est ainsi qu’une nouvelle vie commençait bien différente de ce que j’avais pu connaître jusqu’alors. Mais nous allions bientôt subir la dure loi de la majorité. En effet Marie Mich, de part son métier d’infirmière à l’Institut Jacques Trivas qui accueillait des jeunes filles en danger moral, quittait tôt son pavillon pour entrer tard en soirée. De fait ne pouvant exercer une autorité sur ses enfants, nous subissions ce que les jeunes imposent aux parents qui se trouvent en situation de minorité. Marie Michelle manifestement était dépassée par les évènements, quant à moi, ma marge de manœuvre était étroite. De fait, j’optais pour la solution de me placer comme un ami à leur écoute, pouvant éventuellement les conseiller. Cette attitude se révéla par la suite positive, ainsi durant une courte période de ma vie je pus me consacrer aux problèmes des jeunes ; chose dont j’avais été privé avec mes filles qui étaient partis habiter en Avignon depuis 1972. Sans vouloir me substituer au père, je me sentais à nouveau utile et apprécié.
Le clan des ‘Simonnet’ avait été habitué au confort du Château de Biviers et chacun d’entre eux menait sa vie à sa guise sans se soucier si Marie Mich ou moi-même pouvions répondre du désordre qu’ils occasionnaient dans la maisonnée. Ainsi le levé de chacun s’échelonnait durant toute la matinée et souvent jusqu’à une heure avancée de l’après midi. Les casseroles s’entassaient ainsi dans l’évier, souvent ils laissaient déborder le lait qu’ils faisaient chauffer pour leur petit déjeuner sans avoir l’idée qu’il eu été nécessaire de nettoyer la plaque de gaz . Ils avaient ce caractère un peu bohême qui était exécrable mais aussi qui faisait leur côté attachant.
François avait constitué un groupe ‘Pop’ qui venait régulièrement envahir le sous sol, pour préparer un concert de rock. C’était alors le moment de fuir car les décibels qui traversaient les murs devenaient rapidement insupportables. Ainsi le week end arrivé, Marie Mich et moi désertions le domicile pour l’abandonner aux ‘Simonnet’ qui en faisait leur quartier général.
Souvent le dimanche après midi nous allions chez sa sœur Marie José qui avait un pavillon à Naintré en direction de Châtellerault. ‘Marie Jo’ comme elle se plaisait à la dénommer avait perdu son mari la laissant seule à élever quatre enfants. Nous passions ainsi de longues heures à discuter tous les trois des lourdes vicissitudes que la vie nous avait imposées. ‘Marie Jo’ avait embrassé la carrière d’institutrice et était directrice d’école. Seule Marie Mich s’était écartée du sérail familial en menant une carrière d’infirmière. J’aimais bien discuter avec sa sœur ainée qui manifestement avait la tête sur les épaules. Parfois pour nous éviter d’être confronté au champ de bataille que nous réservait les ‘Simonnet’ nous restions le soir diner avec elle et ses enfants. Je retrouvais en ‘Marie Jo’ une véritable belle sœur me donnant le sentiment d’appartenance à une grande famille comme je l’avais toujours souhaité.
Les soirs d’été il nous arrivait souvent d’aller faire une ballade au bord du Clain. Pour ce faire nous empruntions l’ancienne voie ferrée du petit train à vapeur qui reliait Poitiers à Saint Martin de l’Ars. La ligne de chemin de fer avait été construite entre 1892 et 1895, mais depuis plusieurs décennies la voie était désaffectée et les rails enlevés. Le train empruntait un magnifique viaduc s’élevant à vingt mètre de hauteur au dessus du Clain. De l’ouvrage nous avions une vue splendide de la rivière où se déroulait en cet endroit des courses de canoës. Il se dégageait une fraîcheur reposante rendant encore plus agréable le spectacle. On pouvait contempler à cette heure du soir les cimes des arbres rougeoyant sous les feux du soleil couchant. J’imaginais le spectacle qui s’offrait aux voyageurs qui se rendaient à Poitiers au début des années trente. Pour la petite histoire, le dernier train qui emprunta le viaduc fut le 30 Juin 1934, Marie Mich n’était pas encore née.
D’autre fois nous allions rendre visite à ses parents qui habitaient non loin de là. Amédée Souchaud son père qu’elle appelait tendrement son ‘Poupou’ lui consacrait du temps à l’écouter, c’est par son père d’ailleurs que je pus retrouver dès le mois de Mai 1982 un emploi sur Poitiers. C’était un bon vivant qui avait eu une vie un peu particulière. Souvent il parlait d’une certaine Marie Thérèse qui travaillait au Centre Régional de L’Enfance et l’Adolescence Inadaptée le CREAI de Poitou Charente dont il avait été le Président quelques années auparavant. En fait je compris que Marie Thérèse avait été sa maitresse. Parfois la vie à ses mystères qui restent incompréhensibles, j’aimais bien, pourtant, son père qui disparu brutalement en 1984. Mouty sa mère resta seule dans cette grande maison qui fut le lieu où Marie Mich avait vécu une grande partie de son adolescence.
D’autres fois nous allions rendre visite à sa sœur cadette Anne Marie que nous dénommions tous ‘Mamie’. Elle était mariée à l’époque avec un certain Bernard qui enseignait la philosophie aux élèves du CREPS de Poitiers. Bernard était propriétaire d’une vaste propriété au lieu dit 'Fontaine' à proximité de Chasseneuil-du-poitou où il élevait des chevaux. C’était le ‘bourge ‘ de la famille mais il savait rester simple et il était d’un contact convivial et sympathique. Quant à Mamie, elle enseignait le latin-grec au lycée de Jaunay Clan, c’était une femme intelligente et incontestablement douée : une forte en thème.
En Quête D’Ailleurs :

Les voyages constituèrent souvent une échappatoire à la grisaille de la quotidienneté à laquelle nous étions confrontés. Ainsi dès Juillet 1982, alors que je venais à peine de prendre mes fonctions à L’IME Pierre Garnier, Marie Mich souhaita aller à la découverte de l’Ile de Beauté. On parti avec ses filles Isabelle et Véronique qui souhaitaient partir en camping en bord de mer. La Corse constituait pour elles un attrait qu’elles ne voulaient pas manquer. Pour économiser les frais de bateau, il fut convenu que nous prendrions le ferry de Nice au lieu d’embarquer avec la voiture sur le Napoléon à Marseille. Nous avions près de 1500 kilomètres à parcourir pour atteindre les Alpes maritimes. Comme j’avais l’habitude de le faire lors des grands parcours on fit la route de nuit. C’est Isabelle qui fut chargée de veiller à ce que je ne m’endorme pas au volant en me racontant des histoires drôles dont elle avait le secret. Nous devions traverser le massif central en passant par Limoges, Rodez, et atteindre la dorsale méditerranéenne après avoir dépassé Lodève. Ce n’est que le lendemain en soirée que l’on franchissait la promenade des Anglais. Après avoir connu quelques difficultés à trouver le quai d’où partait notre ferry le lendemain dès cinq heures du matin, il nous restait encore à passer une nuit dans la ville de Nice. N’ayant aucune réservation dans un hôtel, il fallait en cette époque de l’année se résoudre à passer une nuit blanche. Pour combler ces longues heures d’attente je décidais de les emmener visiter Juan les Pins qui avait été une station très en vogue vingt ans plus tôt. Lorsqu’on arriva à destination vers minuit, les rues étaient vides et la plupart des bars étaient désertés. La mode avait changée pour se tourner ailleurs, Juan les Pins n’était plus cette station prisée par les hordes européennes que j’avais connue vers 1963 avec mon ami Patrice Guillaume. Déçus de notre visite nocturne on rejoignit notre quai d’où l’on devait embarquer pour Calvi.
C’est en fin de matinée que l’on récupéra notre voiture sur le quai. On prit immédiatement la route en direction d’Ajaccio pour aller rendre visite à mon frère. En cette période estivale sa mère était venue le voir, je me souviens qu’Aude ma nièce, disait à sa grand-mère : ‘Bonne Maman, je ne t’aim’ pas !’. La petite était âgée tout au plus de cinq ans, mais avait déjà un sacré caractère. Le lendemain on quitta Ajaccio pour nous rendre à Bonifacio qui était le lieu de villégiature que les filles de Marie Mich avaient choisi. On les aida à s’installer dans un camping qui n’était pas trop éloigné des plages, dès lors nos vacances pouvaient commencer. Peu argentés on décida de faire du camping sauvage dans le maquis.
Notre première expédition consista à nous rendre à la baie de ‘Girolata’ qui est un lieu emblématique de l’ile de Beauté. Cet endroit situé à 22 kilomètres au nord de Porto est inaccessible par la route. Notre seule possibilité d’y accéder était d’emprunter un chemin de randonnée qui part du col de la Croix. Nous avions près de trois heures de marche à effectuer à travers le maquis en longeant le ruisseau de Girolata. Chacun muni de son sac à dos, on entreprit ce parcours au travers de sentiers escarpés et chaotiques. N’ayant pas de chaussures de marche, le périple fut assez pénible à effectuer. Ce n’est qu’en fin de journée qu’on accéda à cette baie magnifique, avec ses eucalyptus et son fortin génois. On pût trouver, dans ses escarpements, un petit emplacement permettant de dresser notre tente de montagne. De l’autre côté de la baie on apercevait le ruisseau de la Novalla qui devait y déverser ses eaux par temps d’orage. C’était un décor enchanteur, seule la présence de nombreux plastiques flottant dans les eaux turquoise venaient jeter un désordre généré par des plaisanciers sans scrupules. Affamés et harassés par notre course à travers le maquis on dévora nos sandwiches, puis on sombra rapidement dans un sommeil réparateur. Dans la nuit Marie Mich me réveilla prétextant qu’elle entendait du bruit pouvant être le fait d’un rodeur. Je prêtais l’oreille, mais je ne percevais aucun bruit. Sachant qu’elle avait l’ouïe lui permettant d’entendre un moustique éternuer à cent mètres, je ne pris guère au sérieux ses craintes. Je l’intimais donc à se rendormir. Ce n’est que le lendemain matin que l’on découvrit l’auteur de ces bruits nocturnes. Le fond de notre tente avait été dévoré par une belette qui avait cherché de pénétrer à l’intérieur pour venir grignoter la nourriture que nous avions emballée dans un sac plastique. Sacré dame belette, par gourmandise : elle avait bouffé un morceau de tissu de la tente !
Lorsqu’on entreprit de visiter l’intérieur de l’ile, cela nous amena, naturellement, à passer par Corte qui avait été l’ancienne capitale de l’ile lorsque cette dernière était indépendante du temps de Filippo Antonio Pasquale de Paoli né le 6 Avril 1725 à Morasaglia et décédé le 5 février 1807 à Londres. Corte y avait accueilli le siège du Palazzu Nationale mais également une université qui fut rouverte en 1981. La ville en elle-même ne présentait pas un caractère architectural particulier, si ce n’est que l’agglomération se situe à 450 mètres d’altitude en plein cœur de la Corse et se trouvant à l’embranchement de deux célèbres vallées : celle du Tavignanu, et de la Restonica. C’est donc le hasard qui nous fit choisir la Restonica qui prend sa source au lac de Melo à 1711 mètres d’altitude sur le mont Rotondo. Dans sa partie supérieure le torrent est constitué par d’innombrables piscines naturelles chauffées par un soleil de plomb. La Restonica est considérée à juste titre comme l’une des sept merveilles de l’ile de Beauté. L’appréciation en est tout à fait justifié, mais bien qu’elle offre des perspectives infinies de randonnées cela ne nous épargna pas de se faire appréhender par la gendarmerie de Corte pour avoir pratiqué le bronzage intégral dans un endroit pourtant inaccessible des gorges. C’était certainement le fait d’une dénonciation d’un indépendantiste fanatique qui n’avait pas dû apprécier les formes de Marie Mich. De fait, Girolata et la Restonica furent les faits marquants de ce périple.
Son frère Jean Claude, qui était professeur de gymnastique, avait à la suite de son divorce demandé sa mutation en Guadeloupe où il exerçait à Basse Terre. De fait je ne connaissais pas son frère qui n’était pas revenu, depuis, en métropole. L’été 1983 marquait son retour en France pour la durée des congés scolaires avec ses enfants dont la justice lui avait confié la garde. Dans cette perspective il lui avait proposé de venir passer ses vacances en ‘Guad’. Il lui laissait à disposition la maison qu’il louait ainsi que sa voiture pour visiter l’île. C’était une opportunité extraordinaire de partir ainsi pour les Antilles. Le coût d’un tel voyage, se limitait au prix d’un vol charter avec ‘Nouvelles Frontières’. La ‘Guad’ constitua sans nul doute une épopée splendide dont je conserve encore aujourd’hui un souvenir inoubliable. On embarqua de Bruxelles, à l’époque la France avait basculé depuis peu dans le régime Mitterrandiste, qui fit dire aux douaniers belges : ‘Voici les cocos qui arrivent !’. L’accueil était charmant. Mais en dehors de ce détail mesquin, qui méritait d’être néanmoins souligné, nous allions vivre durant tout ce mois de Juillet 1983 dans un décor féerique et paradisiaque. Jean Claude vint nous accueillir à l’aéroport de Point à Pitre qui se situe dans la deuxième partie de l’ile ‘Papillon’, celle que l’on dénomme Haute Terre. Nous avions près d’une heure de route pour rejoindre Basse Terre ; surpris par ce climat tropical, nous avions une impression de baigner dans une sorte de sauna. Mais selon les propos de Jean Claude notre corps s’y adapterait assez rapidement. Il louait en bordure de la ville, et la maison s’accrochait sur les premiers contre forts de la soufrière. C’était une sorte d’hacienda entourée d’une vaste terrasse. La végétation était luxuriante avec ses flamboyants et toute une flore qui nous était inconnue. On déjeuna sur cette terrasse où régnait une certaine fraicheur en raison des nombreux arbres qui entouraient la maison. A la fin du repas il nous convia à jeter nos déchets pardessus la rambarde. Interloqués on hésitait à suivre ses conseils. Rien à craindre nous répondit-il en souriant, dans un quart d’heure la vermine aura tout absorbé ! Il nous expliqua également qu’à cette latitude les levers et couchers du soleil s’effectuent en très peu de temps. Effectivement si à quatre du matin il faisait encore nuit noire, dans la dizaine de minutes qui s’en suivrait, l’astre de jour culminerait haut dans le ciel comme à l’heure de midi en métropole. Le lendemain Jean Claude s’envola pour Paris, laissant à notre disposition sa voiture et sa maison pour passer un mois complet sous le ciel des Antilles. Peu à peu on s’organisa, notre plage préférée se trouvait du côté de Bouillante à une vingtaine de kilomètres. L’eau dépassait souvent les trente degrés, à tel point que nous avions l’impression de transpirer en nous baignant. Notre première expédition s’effectua en direction des Saintes où l’on pût trouver un gîte d’hôtes à Terre de Haut où se trouve la statue de Christophe Colomb qui découvrit l’archipel des saintes le 4 novembre 1493 qu’il dénomma ‘Los Santos’ en l’honneur des fêtes de la toussaint. C’est là qu’on découvrit l’existence des ‘Becquets’ qui résultent d’un mélange ethnique entre colons et esclaves. Des hommes aux cheveux crépus ayant des yeux bleus comme des bretons mais rongés par le rhum. La Jeanne bateau école de la marine Française y faisait parait-il escale chaque année. Le matin nous traversions le petit bourg de Haute Terre pour nous rendre à la plage qui constitue la troisième plus belle baie du monde après celle d’Along au Vietnam et celle de rio de Janeiro. Chemin faisant Marie Mich avait cette mauvaise habitude de s’arrêter pour aller sous un mancelinier y assouvir un besoin naturel. Malheureusement elle eut la malencontreuse idée d’utiliser des feuilles de l’arbre maudit. Dans les jours qui s’en suivirent, elle se plaignit de douloureuses démangeaisons. Une inspection minutieuse révéla que la muqueuse était entièrement brûlée. On apprit plus tard que le mancelinier est un arbre toxique. C’est un souvenir cuisant qui resta à Marie Mich de son court séjour aux Saintes. Mais cela ne freina nullement son envie de découvrir d’autres paysages. C’est ainsi qu’on se rendit à Point à Pitre pour prendre un petit avion qui après une demi heure de vol nous déposa sur la piste déserte de l’aéroport de Marie Galante. L’île était recouverte entièrement de canne à sucre qui constituait la principale végétation hormis quelques bananiers et de rares flamboyants. Marie Galante était une île perdue dans l’atlantique au sud est de la Guadeloupe, à l’époque déjà quelques hôtels luxueux sortaient de terre pour les touristes américains qui se trouvaient à moins de deux heures de vol. C’était hors de nos moyens, et on se contenta d’un vieil hôtel plus ou moins désaffecté qui avait dû connaitre ses jours de gloire dans les années trente. Il n’y avait pas grand-chose à voir à Marie Galante, si ce n’est que de passer son temps à admirer les vagues de l’océan. Il nous fallait attendre deux jours avant de pouvoir reprendre le petit avion à hélices qui nous ramènerait à Haute Terre en ‘Guad’. On se nourrissait essentiellement de bananes qui étaient les seuls produits mis à la vente, le tout accompagné d’un punch corsé.
A peine remis de nos émotions un après midi il fut décidé de se rendre au port de plaisance de Basse Terre où un copain de Jean Claude avait un catamaran. Un dénommé ‘Périgord’ qui passait son temps à briquer ce vieux rafiot qu’il avait acheté à un touriste américain qui souhaitait s’en défaire. C’était un voilier spacieux avec un grand pont arrière, comprenant six couchettes et un véritable cabinet de toilette sur tribord arrière. Marie Mich était intéressée de faire une petite croisière pour se rendre en Dominique. ‘Périgord’ nous donna son accord sous la réserve de trouver un deuxième couple qui serait intéressé par la course. Dès le lendemain elle trouva le couple exigé. L’affaire fut rondement menée, le surlendemain on appareilla à l’aurore pour affronter le canal cet espace de l’océan qui sépare les différentes îles de l’archipel antillais. Très rapidement on se retrouva vent debout. Le catamaran qui réagissait mal à cette orientation du vent fit que la durée du trajet fut triplée. Ce n’est qu’à la tombée de la nuit que l’on vint accoster le ponton du port de la Dominique. On avait l’impression de se retrouver en plein 18ème siècle. Le lendemain on alla visiter le village, Marie Mich me montra de grosses pustules noires qui envahissaient les jambes de la plupart des femmes. C’était du ‘Pian ‘ me disait elle, une maladie infectieuse qui avait disparue en Europe depuis plus de cent cinquante ans. En fait je compris les raisons pour lesquelles ‘Périgord’ s’était facilement laissé convaincre par Marie Mich. Il voulait se procurer une espèce de bananier qui poussait exclusivement en Dominique et qu’il voulait planter sur son petit lopin de terre qu’il avait à Basse Terre. Au demeurant il disparu une grande partie de la journée pour aller se procurer ce fameux bananier. En fin d’après midi alors que nous étions tous à bord à l’attendre, ‘Périgord’ revint triomphant avec son trophée entre les mains. Dans l’heure qui suivit, on vit apparaître un hors bord de la police maritime qui sans sommation monta à bord. S’exprimant en anglais ils paraissaient furieux :’It’s the Law’ hurlaient ils. En fait on comprit rapidement que ‘Périgord ‘ avait été dupé par ceux qui lui avait vendu le pied de bananier dont l’exportation était parait il interdite par la petite république Dominicaine. Par ce petit manège, le même arbre pouvait être vendu des dizaines de fois. Les bénéfices étaient ainsi partagés entre les producteurs et la police dominicaine. Naïf ce pauvre ‘Périgord’. A la tombée de la nuit on appareilla pour rejoindre Basse Terre. Ayant les vents dans le bon sens on arriva vers minuit à la hauteur des Saintes, il nous proposa d’y faire escale. C’est dans des conditions dignes d’un flibustier qu’on s’engouffra dans une sorte de défilé qui nous conduisit au fond d’une petite crique de Terre de Haut. C’est alors qu’il nous confia que le catamaran était dépourvu de signalisation lui interdisant d’accoster de nuit à Basse Terre en raison des risques de collision. Le lendemain il nous proposa de contourner Terre de Haut pour rejoindre Terre de Bas la deuxième île de l'archipel. La mer était agité, il jeta l’ancre dans la baie et plongea pour rejoindre la plage qui se trouvait en face de nous à quelques cinq ou six cent mètres. Si nous voulions faire un petit tour dans l’île nous devions utiliser la même méthode. Le couple qui nous accompagnait ne souhaita pas se joindre à nous, c’est dans ces conditions que nous plongions pour rejoindre la terre ferme. Poussés par le vent on arriva sans difficulté à rejoindre la plage. On parti à l’exploration de l’île où manifestement il n’y avait pas grand-chose à voir. ‘Périgord’ quant à lui s’était évaporé dans la nature. Ne sachant que faire sur cette île battue par les vents on décida de rejoindre le catamaran. Mais cette fois ci nous avions à affronter le vent qui freinait notre progression. Les vagues venaient nous frapper le visage, il fallait surtout ne pas paniquer, et nager à l’indienne afin de les briser. Après plus d’une demi-heure de nage on parvint au bateau. Mais nous n’avions pas d’échelle pour monter par l’arrière et chaque fois que nous essayions de nous agripper au bastingage, la coque se soulevait de plus d’un mètre de hauteur rendant vaine nos tentatives. On se décida d’appeler le couple qui était resté à bord. Au bout d’un moment nos appels furent entendus et une main salvatrice nous aida à nous hisser à bord. Nous venions d’échapper de peu à une noyade.
La fin du séjour en Guad fut plus calme, et réservé à des visites plus traditionnelles. C’est ainsi qu’on se rendit au sommet de la soufrière qui s’élève à plus de 1467 mètres. Le volcan est constitué d’un cône tronqué ayant plus de 900 mètre de diamètre à sa base et laissant s’échapper de ses entrailles des vapeurs sulfureuses interdisant toute forme de végétation sur sa partie supérieure. Ce fut le dernier paysage grandiose que l’on pût voir de la Guadeloupe avant de rejoindre la métropole.
L’été 1984 fut marqué par notre séjour Bulgare à Varna. Selon les historiens, c’est une des villes les plus anciennes d’Europe, répondant du nom d’Odessos dans la haute antiquité. Elle aurait été fondée par les colonisateurs de Milet au 6ème siècle avant Jésus Christ sur les bords de la mer noire. Dès notre arrivée sur la côte du soleil, on ne pouvait se satisfaire de faire la navette entre la plage et l’hôtel comme le faisait la majorité des touristes. Notre frénésie à visiter ce pays, qui appartenait encore à l’empire communiste, fut plus forte que jamais. Dans les jours qui suivirent notre arrivée on alla visiter la ville de Nessebar qui se situait seulement à quelques kilomètres de notre lieu de villégiature. La ville antique avait été fondée par les thraces et se dénommait Melsambria en l’honneur de Melsa le fondateur légendaire de la cité. Dès 70 avant Jésus christ la ville thermale fut prisée par les empereurs romains venus s’installer à Constantinople. Par la suite Nessebar tomba sous la tutelle de l’empire ottoman. Ainsi celle cité vieille de plus de vingt six siècles fut marquée par ces trois grandes civilisations qui exercèrent leur domination, tout en y laissant l’empreinte de leurs cultures.
Nous n’entretenions peu de rapports avec les autres personnes qui étaient arrivés en même temps que nous à l’hôtel. De surcroit, on réalisa rapidement que la plupart d’entres eux étaient des membres de comités d’entreprises. De ce fait une grande partie de leurs frais de séjour étaient financés par le comité. Nous étions, donc, vraisemblablement les seuls à avoir réglé la totalité des frais de séjour à Nouvelles Frontières. Le parti communiste Bulgare qui contrôlait la gestion de l’hôtel proposa un circuit touristique pour visiter la Bulgarie à un prix défiant toute concurrence. Ainsi pour moins de neuf cent francs on nous proposait un tour complet de la Bulgarie, d’une durée de huit jours, en faisant halte le soir dans les plus grands hôtels dont disposait le pays. C’était une opportunité à saisir. C’est à Plovdiv que l’on visita les tombeaux Thraces : cette civilisation constituée par les tribus des Odryses, des Gètes, des Triballes et des Daces. On y apprit également que les thraces furent les alliés des Grecs en assiégeant Troie. Mais c’est à l’époque Romaine que Plovdiv l’antique cité Thrace y connu son apogée. D’autres villes furent également visitées comme Sofia, la capitale, mais qui ne se distinguait en rien d’une autre ville européenne. Ce qui nous frappa lors de ce voyage, c’était le délabrement dans lequel se trouvaient les lieux du culte, ou encore les vitrines d’anciens commerces qui avaient existés avant guerre. Cela donnait l’impression que toute catégorie de la population était mise à l’index. De même qu’il nous paraissait curieux de voir des milliers de maisons aux façades inachevées. Le guide nous expliqua que les propriétaires n’achevaient pas les travaux pour éviter de payer un impôt auquel ils auraient été assujettis en cas d’achèvement de la maison. Cela laissait un gout d’inachevé contribuant à dénaturer complètement le style Bulgare.
Notre dernier été de l’ailleurs, fut marqué par notre séjour à Salou en Aout 1985. A l’époque j’avais déjà quitté Poitiers, depuis le mois de septembre de l’année précédente, pour occuper un poste de Directeur de Clinique à Vendôme dans le loir et Cher. De fait je ne bénéficiais que de trois semaines de congés. Salou fut donc notre lieu de villégiature retenue. A l’origine, nous devions nous rendre à Benidorm dans le sud de l’Espagne, mais ayant fait une halte à Salou on décida de ne pas aller au-delà. Pour Marie Mich ce séjour en ce lieu de la Costa Dorada constituait une sorte de pèlerinage. En effet à l’époque de son mariage avec René Simonnet, ils avaient acquis un appartement dans cette station balnéaire où ils se rendirent en vacances d’été régulièrement durant de nombreuses années. On trouva, grâce à sa connaissance des lieux, une location dont le balcon nous permettait d’avoir une vue sur la mer et la pinède environnante. A l’inverse des autres années, on resta sur place, on se contentait de se rendre parfois le soir dans le centre de Salou pour y prendre un bain de foule dont le flot ne se tarissait qu’à l’aurore le lendemain. C’est à notre retour de vacances, que l’on décida de faire un crochet par Sète pour tenter d’aller saluer ‘Louis Le Magnifique’ que je n’avais plus vu depuis 1977. Une halte à Sète que j’ai décrite précédemment à l’article 25.

1 commentaire:

Copernic a dit…

Dans la Vie quotidienne à Saint Benoit, il ne faut pas manquer d'évoquer le souvenir de Fléau cet ami qui lui rendait parfois visite. Il parlait toujours d'un piano qui faisait plus d'bordel que d'musique.
Sacré Fléau, il est un jour parti subitement dans l'ailleurs....